Face aux enjeux sociaux et environnementaux de notre société, nous sommes de plus en plus nombreux à nous engager dans un mode de vie différent. Un mode de vie plus respectueux du Vivant.
Oui mais voilà changer ses habitudes ce n’est pas toujours évident, surtout lorsque l’on ajoute à sa charge mentale - devenue presqu’habituelle - une charge morale qui nous engage, qui nous impose, qui nous oblige presque ABSOLUMENT à engager ces changement.
Ajouté à cela, notre envie de faire tout de suite et de tout changer du jour au lendemain, on file droit vers le burn-out écologique !
Pour avancer dans cette réflexion j’ai eu l’honneur de rencontrer et d’interviewer Sandra Boré, scientigeek effervesciente, elle a fondé EfferveScience pour accompagner les travailleurs, indépendants et étudiants à reconnaître les signes du burn-out pour mieux se préserver du stress chronique et de la surcharge mentale.
Sandra : pendant 10 ans j’ai été scientifique en prévention santé. Je concevais des contenus pédagogiques en collaboration avec des chercheurs et médecins. J’ai également été graphiste, photographe, webmaster, chef de projet formation, chargée de pédagogie, veilleuse, et au moment merveilleux de la naissance des MOOCs et de l’apprentissage à distance : conceptrice puis responsable e-learning. Pourvue d’une soif irrépressible d’apprendre, je me suis nourrie de plein de choses passionnantes. Mon profil de multipotentielle associé à une tendance au perfectionnisme m’a confrontée à mes limites que mon corps s’est empressé de me rappeler: j’ai vécu 3 burn-out ! C’est à ce moment là que j’ai créé EfferveScience dans le but de sensibiliser et d’accompagner le grand public de manière ludique à la prévention du burn-out.
Mon profil de multipotentielle associé à une tendance au perfectionnisme m’a confrontée à mes limites que mon corps s’est empressé de me rappeler: j’ai vécu 3 burn-out
Sandra : En effet, selon une enquête qui date de 2017; 1 salarié sur 3 et 1 chercheur d’emploi sur 2 déclare avoir déjà fait un burn-out. Cette situation est caractéristique d’une société en quête de sens et qui va de plus en plus vite. Résultat: nous finissons par décompenser à force de nous suradapter. L’origine du burn-out est multifactorielle. Elle concerne notamment le fait que nous avons des attentes de plus en plus fortes par rapport aux ressources dont nous disposons pour les réaliser. Nous subissons également de nombreuses injonctions, parfois contradictoires, qui nous mettent la pression. Facteur aggravé par le “cumul des fonctions” que nous vivons et qui est plus largement subi par les femmes qui doivent à la fois être de bonnes mères, de bonnes épouses, efficaces dans leur travail, en forme physiquement, ….et aussi tout simplement des femmes épanouies et heureuses le tout sous couvert de versions idéalisées du monde imposées par les réseaux sociaux!! Ne serait-ce qu’à l’époque de nos grands-parents cette multiplication des rôles et ces injonctions cumulées étaient beaucoup moins présentes
Sandra : Le burn-out est une invitation à changer de rythme, de retrouver une temporalité plus écologique; c'est-à-dire qui nous fait du bien. Pour cela , il s’agit d’être à l’écoute de ses besoins et de se faire plaisir. Aujourd’hui on a trop tendance à être tout le temps à fond: ce rythme n’est pas tenable sur la durée...c’est comme vouloir faire un sprint sur un marathon ! Le concept du “slow” qui a commencé avec le mouvement “slow food” et qui se décline désormais dans d'innombrables combinaisons, est un indicateur de ce besoin impérieux de ralentir. Alors oui, ralentir peut faire peur, peut nous confronter à des injonctions fortes mais cela fait partie du travail de déconditionnement nécessaire pour éviter le burn-out. Ralentir ce n’est pas faire moins ou être feignant, c’est faire mieux en allant à l'essentiel et en mettant son énergie au bon endroit. Il s’agit également d'apprendre à s’écouter. Notre société nous a complètement coupé de nos émotions en nous faisant croire qu’elle sait ce dont on a besoin, ce qui est bon pour nous. En cela nous nous sommes affranchis de notre intériorité au profit d’une société qui nous impose ses diktats. Or chaque émotion a un message à faire passer, un signal à nous envoyer pour mieux nous comprendre et vivre en harmonie avec nous-même (et donc avec les autres).
Oui, ralentir peut faire peur, peut nous confronter à des injonctions fortes mais cela fait partie du travail de déconditionnement nécessaire pour éviter le burn-out
Sandra : Oui, le burn-out n’est pas simplement individuel, il est aussi sociétal et environnemental. Face à l’urgence écologique, de nouvelles injonctions se font jour et imposent (souvent aux femmes à nouveau) une charge morale qui s’ajoute à la charge mentale déjà prégnante qui contribue à l’épuisement général. Pour moi vivre de manière écologique c’est faire non seulement attention à son mode de consommation “matériel” (alimentation, achats en tout genre), mais aussi immatériel, et je parle là de la masse d’informations à laquelle nous sommes en permanence confrontés: ce que l’on appelle l’infobésité qui contribue également à l’épuisement sociétal. Notre cerveau n’est pas fait pour traiter autant d’informations et se retrouve en surchauffe permanente, harcelé par cette peur de louper l'info cruciale : cette fameuse FOMO (Fear Of Missing Out) qui nous conduit à une connexion permanente qui peut aussi nous mener à l’épuisement. Ce besoin d'immédiateté est lié à nos biais cérébraux. Nous sommes par essence, à l'affût de tout danger potentiel. Ainsi, chaque notification qui s’affiche sur notre téléphone se transforme en pic de dopamine qui s’autoalimente par encore plus de dépendance. Pour s’en défaire, il s’agit de mettre en place sa propre écologie : les moyens que nous choisissons de mettre en place pour limiter cette addiction toxique.
Sandra : La meilleure façon d’éviter l’épuisement écologique est d'avancer petit pas par petit pas en commençant par ce qui nous semble le plus facile à mettre en place. Changer ses habitudes au fond est une bonne chose : on aurait besoin entre 10 et 20% de changement dans nos vies chaque année. Alors changer, oui c’est très bien, mais il faut savoir où on va. On ne peut pas engager des changements radicaux dans tous les domaines de notre vie; la transition doit être douce. Je propose de définir 1 objectif, de rechercher des informations sur le sujet et de s’inspirer des autres. Et même si la motivation de changer doit venir de soi (sinon cela met trop la pression en nous comparant aux autres), je conseille également d’être accompagné. On n’est pas seul - il est bon de faire appel autour de nous pour trouver de l’aide, que ce soit dans notre entourage ou par des professionnels de l'accompagnement. Le dernier conseil serait d’apprendre à être bienveillant avec soi-même, accepter qu’il y a des jours sans, sans culpabiliser : c’est ce que l’on appelle l’écologie personnelle.
On ne peut pas engager des changements radicaux dans tous les domaines de notre vie; la transition doit être douce.
Sandra: Il s’agit d’une citation japonaise “On commence à vieillir quand on finit d’apprendre”. L’apprentissage est source de longévité et cela a été prouvé par les neurosciences ! A mon sens, il est essentiel d’apprendre pour pouvoir intégrer des changements dans sa vie et pouvoir les retransmettre à notre tour.
Un petit mot pour finir ?
Sandra : Je vous invite à déterminer ce que vous avez envie de faire dans les semaines, les mois ou l’année à venir et de vous engager dans une démarche constructive de changement en appliquant la méthode de Barbara Sher “ learn try teach leave”.
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